Les tribulations d’un (ex) astronome

Foot

jeudi 29 juin 2006 par Guillaume Blanc

J’en parle ou j’en parle pas ? La chose mérite-t-elle seulement qu’on perde cinq minutes pour en disserter ? Bah, je suis lancé, autant continuer !

Ainsi, même en écoutant la radio parcimonieusement ces temps-ci (voire pas du tout), j’ai malgré tout réussi à savoir, contre mon gré, que la France jouait contre l’Espagne mardi soir, faute à un ami italien actuellement en Espagne qui m’envoie un mail. Je ne sais pas trop si c’est un ami qui me veut du bien. Bref. Mardi soir, j’ai raté le RER pour St Rémy à trente secondes près, il m’a fallu poireauter pas loin d’une demi-heure à Denfert pour chopper le suivant. Il était 19h30 - 20h. Suivant qui arrive absolument bondé, avec des visages de gens écrasés sur la vitre : horreur ! D’autant que le quai en attente était loin d’être vide. Loin s’en faut. Mais rien à faire, je rentrerais dedans quoiqu’il arrive, je n’avais pas particulièrement envie de patienter une autre demi-heure. Tant pis pour la sur-compression que cela implique. Le trajet vers la station suivante fut bien long, j’ai eu le temps d’apprécier la condition de la sardine (vivante) en boîte... Cité Universitaire. L’ouverture des portes m’expulse joyeusement dehors. Surpression. De l’air ! Et là, outre le miracle respiratoire, un autre, inattendu, de miracle : le train se vide, des centaines de personnes descendent et envahissent les quais. Ça saute par-dessus les tourniquets pour sortir (dire que je paye mon trajet et me retrouve compressé à cause de #$**%&@s qui ne payent pas...). Et j’ai compris qu’il y avait du foot dans l’air. Comme les espagnols se mêlaient allègrement aux français, j’ai supposé que le match n’était pas commencé.

En arrivant je suis allé courir, expulser cette transpiration citadine qui me collait au corps, dans la forêt buressoise. Un peu de solitude, mais pas trop, des grimpeurs sur le viaduc, des pique-niqueurs dans le champs, une promeneuse, un petit lapin à la queue blanche qui sautillait gaiement. Tandis que le soleil se couchait sur l’horizon, exhibant son somptueux disque rouge à qui voulait bien y jeter un œil pour le contempler, une sourde clameur emplit l’air soudainement, montant du fond de la vallée. Comme si chaque habitant de la région s’était mis à gueuler simultanément. Une clameur tribale. Et de fait. J’ai compris qu’un but français venait d’être marqué. Même un troupeau de bisons descendant la vallée au grand galop n’aurait pas fait autant de boucan. J’hallucinais. J’avoue être vraiment dubitatif sur ces étranges comportements. Ça me donnerait presque envie de me retaper une thèse, en socio(zoo ?)logie, cette fois : « Du comportement animal des amateurs de foot pendant le mondial »... À mon avis, il y a de quoi faire. Consternant.

Comment un simple ballon peut-il générer de pareils déchaînements ? Comment un simple ballon au fond d’un filet peut-il déchaîner des cris simultanés chez des milliers de personnes (vive la télé) ? Il n’y a même pas d’exploit, au sens sportif du terme : « action remarquable, exceptionnelle, dépassant les limites habituelles. » Si elle a un caractère exceptionnel, l’action de coller un ballon au fond d’un filet n’est en rien remarquable, sauf dans le cas (unique ?) où le buteur joue à Platini en incurvant la trajectoire de la balle grâce à l’effet Magnus, et quoiqu’il en soit, ça ne dépasse en rien les limites habituelles. Bref, le foot, rien à voir avec le tour du monde à la voile, en solitaire sans escale, ni avec la traversée de l’Antarctique à pieds ou encore l’ascension du K2. Pourquoi tant de gens s’enthousiasment-ils pour des mecs qui s’agitent en tout sens pour taper dans un ballon ? Peut-être parce que les sports de ballon, à peu près tout le monde (sauf moi) est capable d’y jouer ; moi, je suis capable de marquer des buts contre mon camp ! C’est vrai que le citoyen lambda qui n’a jamais fait de voile va trouver l’exploit des marins autour du monde un peu loin de sa réalité quotidienne. Alors que le foot, ma foi, il sait ce que c’est, tout un chacun peut y jouer, y a certainement déjà joué (même moi, en cours de sport au collège-lycée, mais je précise que c’était contre mon gré). Peut-être est-ce l’insoutenable suspense, qui va gagner ? Parce que dans la bataille avec les éléments naturels, la mer, le vent, le froid, l’altitude, chacun sait qu’il n’y a pas de suspense : tout est truqué et donc joué d’avance.

Et pourquoi le foot, et pas le volley, le rugby ou le handball, qui sont aussi des sports de ballon ? Pourtant, le volley, presque tout le monde y a également joué, mais pourquoi n’a-t-il pas l’ampleur du foot, mystère... Pourtant, on peut même y jouer sur la plage... Peut-être parce que pour jouer au foot, un ballon suffit, alors que pour le volley il faut en outre un filet... Ça limite pas mal. Mais pourquoi la plèbe préfère-t-elle regarder le foot plutôt que le volley ? Car le seul exploit, finalement de ses protagonistes, c’est de gagner bien plus de fric que le citoyen lambda ne pourra jamais en rêver. Le voilà, l’exploit qui fait grimper l’audimat et ronfler la vallée ! Le pourquoi du comment les footballeurs en sont arrivés là et pas les volleyeurs, mystère... (Décidément, y’a beaucoup de mystères dans cette histoire : c’est louche).


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