Les tribulations d’un (ex) astronome

L’université doit-elle désormais pallier l’échec de tout le système éducatif ?

jeudi 2 juillet 2015 par Guillaume Blanc

Je suis furieux. Ce matin, j’avais convoqué trois étudiants pour leur examen de seconde session (rattrapage). Ils étaient inscrits en contrôle terminal (donc dispensés de contrôle continu), et qui avaient évidemment loupé (et de loin) l’UE dans laquelle j’enseignais. Je les ai convoqué par mail, en leur demandant de me répondre s’ils comptaient venir ou pas (la perspective de préparer un sujet et de me pointer pour rien ne m’enchantait guère). Au bout de trois messages de ma part de plus en plus insistants, une des trois étudiantes a fini par me répondre qu’elle serait là. Cela me suffisait. Aucune nouvelle des deux autres. J’ai donc préparé un sujet, que j’ai imprimé, etc. Je vais exprès à Paris pour ça (2h de RER aller-retour), j’ai même poireauté une heure dans la salle d’examen, on ne sait jamais, un problème de transport est si vite arrivé. Personne. Personne. Personne. Et merde.

Et cette sensation particulièrement désagréable d’être pris pour un con. Alors quoi ? L’université doit déjà pallier la déficience du secondaire en terme de bases scientifiques (je parle pour la physique) : le lycée ne raconte plus qu’une belle histoire (et même celle du boson de Higgs) au lieu de jeter les bases (mathématiques) de la physique classique. L’université s’est donc adaptée a posteriori devant le fait (quasi)-accompli (pensez-vous que tout cela soit prévu en amont ? Que nenni !), pour adapter son programme aux nouveaux bacheliers, en partant donc du niveau zéro. En fait le secondaire ne sert plus à rien, pour apprendre la physique, il vaut mieux aller directement en licence.

Mais comme les étudiants ne savent pas écrire (phrases qui ne veulent rien dire, orthographe très approximative, etc), cela signifie que le primaire est également déficient. Les réformes successives, le nivellement par le bas, etc, ont finalement raison d’une certaine excellence que l’on nous ressort pourtant dans d’autres circonstances jusqu’à l’écœurement. On n’en n’est pas encore (à Paris Diderot en physique) à donner des cours de français à nos étudiants, mais ils en auraient grand besoin.

Et quoi d’autre ? Il faudrait également que l’université pallie la déficience de la cellule familiale : l’éducation s’est évaporée, la notion de respect envolée. Ils prennent rendez-vous, arrivent en retard, ou ne viennent pas, ne s’excusent jamais, ou presque. Rarement bonjour-au-revoir, merci non plus (ma fille, 2 ans et demi en est déjà là, elle). Tout leur est dû, dès qu’un prof fait un pet de travers, il a les syndicats étudiants sur le dos, mais si c’est un étudiant ? Ben, il a le droit, lui après tout. Les étudiants n’ont pas (plus ?) le respect vissé au corps, mais par contre ils osent. Il y a peu, en jury de licence 2e année (L2), une demande faite par un étudiant (les étudiants ont la possibilité de faire des demandes au jury, souvent d’ajouts de points, notamment si la « moyenne de 10/20 » est frôlée par valeur négatives) :

Demande au jury L2
« avoir la moyenne par tout pour augmenter ma moyenne générale et compenser les deux semestres »

Et puis le beurre et l’argent du beurre pendant qu’on y est ? Là, au moins on s’était bien marré !

Comment vivre en société sans un minimum de respect les uns envers les autres ? Nous désormais trop entassés les uns sur les autres et en constantes interactions pour que l’égoïsme ait encore sa place. Devons-nous aussi faire des cours de civisme ?

Ceci étant, je ne peux pas vraiment en vouloir aux jeunes eux-mêmes, il suffit que je regarde mon ex-belle sœur au comportement absolument immonde envers mon frère qu’elle a foutu dehors et à qui elle a balancé un avocat sur le dos ; comment leur gamin pourra-t-il intégrer cette notion fondamentale de respect ? Il voit faire sa mère, il fera pareil. Écraser les autres sur son chemin dès que la moindre contrariété apparaît. Égoïsme ravageur.

Bref, faites des enfants, oui, mais de grâce donnez-leur une éducation digne de ce nom. Et sachez rester dignes et respectueux en toute circonstance ! Parce qu’après c’est moi (entre autre), et surtout la société, après, qui récoltons les fruits (pourris) de vos démissions parentales. En plus de celle du système, tous ces politiques véreux qui veulent donner leur nom à des réformes, aussi exécrables soient-elles. Les politiques passent, les réformes restent, elles. Enfin jusqu’à la suivante qui ira encore un peu plus loin dans le nivellement par le bas, la minimisation des acquis, etc. Que restera-t-il ensuite ?


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