Melancholia
Week-end au bercail, entre bricolage, course à pied dans la verdoyante vallée de Chevreuse, et... cinéma ! Cela faisait une éternité que nous n’y avions mis les pieds, pour renouer avec les salles obscures, nous nous sommes offerts deux belles toiles, coup sur coup.
D’abord, « La dernière piste, » western de Kelly Reichardt qui n’a du genre que le fait que l’histoire se passe à l’ouest des États-Unis, en Oregon, au milieu du XIXe siècle, en pleine époque de sa conquête. Sorte de huis-clos au beau milieu du désert, trois familles d’émigrants engagent un aventurier pour les guider vers la terre promise. En guise de terre promise, on les retrouve errant dans un désert sans limite, perdus, malgré leur guide arrogant, bientôt remplacé par un Peaux-Rouge, bien loin du mythe colporté par les westerns habituels. En quête d’eau, la découverte fortuite d’un gisement d’or ne les fait même pas frémir...
Une ambiance lourde, ils ne savent jamais ce qu’ils vont trouver au-delà de la prochaine colline : l’eau tant attendue, ou bien une horde de sauvages prêts à les scalper sur place ? Le film est très lent, il ne se passe quasiment rien, mais pourtant le spectateur reste tenu en haleine pendant une heure trois-quart. La musique est inquiétante, les images, en format 4/3 sont superbes. Nous étions un peu fatigués après une bonne journée de bricolage, on ne s’est même pas endormis ! Un signe, non ? La fin est fantastique, vous m’en direz des nouvelles :-)
Et puis le lendemain, nous avons récidivé avec le dernier opus de Lars Von Trier, « Melancholia. » Anne-Soisig n’a pas trouvé ça terrible, ennuyeux, lent, déprimant. Moi, j’ai adoré. Un film sur la fin du monde, tout simplement. On est tout de suite mis dans le bain : l’ouverture nous annonce la couleur, ralenti sublime sur fond de Wagner. La Terre finit percutée par une grosse planète. Phagocytage.
Deux parties. Tout d’abord, le mariage de Justine (Kristen Dunst, prix d’interprétation féminine à Cannes 2011), avec une protagoniste qui sombre doucement dans une sorte de folie douce allant crescendo au cours de la soirée. Les ingrédients du raté sont là : les mariés arrivent à la fête avec un certain retard, une mère superbe (Charlotte Rampling), qui commence par annoncer à la cantonade qu’elle déteste les mariages, un père qui appelle tout le monde Betty... Bref, une bien belle galerie de personnages !
La deuxième partie est plus centrée sur le personnage de sa sœur, Claire (Charlotte Gainsbourg), qui avait accueilli la fête du mariage de Justine dans son château en pleine cambrousse (en forme de golf dix-huit trous, la cambrousse). Justine revient, mais complétement dépressive, n’ayant plus goût à rien. Le mari de Claire se prend de passion pour la planète qui s’approche inexorablement, Melancholia. Claire est angoissée par la perspective de cet avenir à court terme. Son mari tente de rassurer son petit monde, femme, enfant, belle-sœur, mais surtout femme, que la chose ne sera qu’un superbe spectacle, rien de fatal n’est prévu par les « scientifiques. »
Encore un huis-clos au beau milieu d’une vaste campagne, surtout dans la deuxième partie, avec une fin du monde proche, et rien, nulle part où se cacher pour échapper au destin de la planète. Les personnages vivent la chose chacun à sa façon. Avec passion, angoisse, innocence ou fatalisme. Cette fois-ci, pas d’effets spéciaux, d’explosions hollywoodiennes, la fin du monde est vécu non pas globalement (le reste du monde n’est pas le soucis des protagonistes), mais intimement, de l’intérieur. Lars von Trier étudie la chose non pas du côté pyrotechnique et extravagant, mais du côté psychologique. Autre point de vue. L’aspect astronomique de la chose n’est qu’un prétexte pour jouer avec ses personnages.
Guillaume Blanc
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