Il est parfois des découvertes scientifiques, et plus particulièrement astronomiques, qui passent dans le poste, qu’il soit radiophonique ou télévisuel. C’est ainsi que la semaine dernière l’un de mes étudiants m’a (presque) appris la découverte d’une autre Terre, ailleurs. Presque, parce que j’avais effectivement lu (en diagonale) un communiqué de presse de l’Observatoire Européen Austral (ESO) arrivé dans ma messagerie le matin même, mais que comme je n’ai pas la télé, et que j’écoute peu la radio ces temps-ci, je ne m’imaginais pas qu’une telle nouvelle puisse passer au vingt heures.
Même si, quand même, elle est de taille, cette découverte : rien de moins qu’une planète extra-solaire qui ressemble pas mal à notre chère Planète Bleue. Parce que jusque là, toutes les planètes découvertes ailleurs que dans le Système Solaire, c’est-à-dire orbitant autour d’autres étoiles que le Soleil, étaient de la taille des grosses planètes que nous connaissont, Jupiter, Saturne, Uranus ou Neptune. Des planètes gazeuses, donc, impropres à abriter la vie — tout au moins sous la forme que nous lui connaissons. Point de planète solide — tellurique — d’une taille « humaine. » Point ? Pas tout à fait, car en 2005 des astronomes ont annoncé la découverte d’une exoplanète dont la masse est estimée à un peu plus de cinq fois celle de la Terre, faisant ainsi de OGLE-2005-BLG-390Lb la plus petite des planètes extra-solaires. Jusqu’à aujourd’hui.
La quête aux exoplanètes exotiques, c’est-à-dire le plus possible semblables à la Terre, est impitoyable ; elle regroupe de nombreux astronomes de par le monde, qui se font le plus souvent une sévère concurrence. C’est à qui trouvera la nouvelle « Terre » ? Depuis la découverte de la première planète extra-solaire en 1995, par Michel Mayor et Didier Queloz à l’observatoire de Haute-Provence, plus de 200 de ces astres moribonds ont été détecté, la quasi-totalité ont des masses typiques des planètes gazeuses géantes de notre Système Solaire, et orbitent rapidement (en quelques jours) autour de leur étoile.
Cela ne signifie nullement que toutes les planètes existantes en dehors de notre Système Solaire sont grosses avec une année qui dure quelques jours, il s’agit là d’un biais de détection lié à la principale méthode de recherche de planètes lointaines. Ainsi la plupart de ces planètes sont découvertes en observant le spectre de leur étoile. Un spectre c’est la décomposition de la lumière émise en fonction de la longueur d’onde, exactement comme une goutte d’eau décompose la lumière du Soleil, produisant un arc-en-ciel. Outre un joli panel coloré, ces spectres contiennent des raies fines, signatures de processus physiques ayant lieu lors de la production de la lumière et de son émission par l’étoile. La présence d’une planète orbitant autour d’une étoile a pour effet de faire osciller un petit peu l’étoile, autour d’une position d’équilibre, en réaction aux mouvements de la planète. Ces petits mouvements de l’etoile se retrouvent dans son spectre : les raies sont décalées, vers le rouge si la planète « tire » son étoile loin de nous, et vers le bleu si la planète « tire » son étoile vers nous... Cela demande des instruments très pointus, car le décalage à observer est très faible.
Bref. Et puis il y a eu cette nouvelle planète, découverte à l’observatoire de La Silla au Chili, par une équipe franco-portugo-suisse. La plus petite planète découverte jusque là. Elle orbite autour de l’étoile « Gliese 581 », 581e entrée dans le catalogue de Gliese qui liste les étoiles connues dans la proche banlieue solaire. De fait, cette étoile se trouve à seulement une vingtaine d’années-lumière de chez nous. Autant dire à côté. C’est une naine rouge, plus petite que notre Soleil, encore plus banale, puisque 80 % des étoiles proches sont des naines rouges. La planète a été baptisée « Gliese 581c », car il s’agit de la deuxième planète découverte autour de cette étoile.
Gliese 581c défraie la chronique car c’est la première fois que l’on trouve une exoplanète semblable à la Terre (sa masse serait d’environ cinq fois celle de la Terre, et son rayon, une fois et demi plus grand), et qui plus est à une distance telle de son étoile que la température à la surface permettrait à l’eau d’y être liquide, condition pour éventuellement engendrer la vie... Évidemment, Gliese 581 est une étoile plus petite et plus froide que le Soleil, et donc moins lumineuse. De fait la « zone habitable » autour d’elle se situe plus proche qu’elle ne l’est du Soleil. Ainsi, Gliese 581c se trouve seulement à 11 millions de kilomètres de son étoile, alors que la Terre se trouve quatorze fois plus éloignée du Soleil. En vertu des lois de la mécanique céleste, l’année sur Gliese 581c ne dure que 13 jours terrestres...
Une vie serait-elle donc possible sur cet ailleurs ? Pourquoi pas ? Mais la vie est parfois capricieuse. Cette planète, bien que bénéficiant a priori d’une température relativement clémente, est probablement en rotation synchrone avec son étoile, en raison de sa grande proximité ; les effets de marée doivent y être bien plus intenses que ceux de la Lune sur la Terre ! Cela signifie qu’elle présente toujours la même face à son étoile, exactement comme la Lune présente toujours la même face à la Terre. Donc pas de régulation thermique sur l’ensemble de sa surface grâce à la rotation de la planète sur elle-même, et donc probablement une face éclairée très chaude, et une face obscure très froide. Pas facile pour que la vie se développe dans ces conditions... De plus les naines rouges sont généralement le siège de violentes éruptions qui pourraient fortement contrarier une éventuelle vie... Même si, même si... Qui sait ?
Cette nouvelle planète n’est peut-être pas encore la sœur jumelle de la Terre, il va sûrement falloir attendre encore un peu, que les instruments s’affinent, pour nous trouver des copains extra-terrestres ou même seulement essaimer ailleurs.
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