Loupiote suspendue dans le ciel, diurne ou nocturne, c’est selon, elle éclaire vaguement le voyageur insomniaque d’une lueur blafarde, elle alimente nombre fantasmes, elle décore admirablement notre ciel, la Lune ! Les astronomes ne savent pas exactement comment cet unique satellite naturel de la Terre est apparu. La Terre s’est d’abord formée au sein d’une nébuleuse de gaz et de poussières autour du Soleil naissant, tout comme les autres planètes du Système Solaire. Puis elle aurait subit un ou des impacts d’astéroïdes qui lui auraient arraché de quoi fabriquer la Lune. La Lune est « ronde » parce que suffisamment massive pour que sa gravité supplante les forces de déformation du matériau lunaire, contrairement à la comète Tchouri qui a une forme cacahouétoïdale.
On obtient ainsi un astre orbitant autour de la Terre en un peu plus de 27 jours, dont le rayon est environ le quart de celui de la Terre, et la masse un centième de fois celle de la Terre. Il se trouve à 384 000 km en moyenne de la Terre, sur une trajectoire légèrement elliptique : sa distance à la Terre variant de plus ou moins 5 % tout au long de sa période. La Lune se retrouve ainsi fortuitement avec à peu près la même taille apparente dans le ciel (0,5°, soit la taille d’un petit pois vu à une distance d’un mètre) que le Soleil. Cela augure des éclipses de Soleil rares mais spectaculaires.
Elle nous présente toujours la même face car sa période de rotation sur elle-même est égale à sa période de révolution autour de la Terre : sa rotation s’est stabilisée sur sa révolution à cause de la perte d’énergie par frottement due aux marées de la Terre sur la Lune...
Commençons notre balade sélène par le spectacle des phases de la Lune qui ne peut qu’enchanter le voyageur qui vit au rythme du jour et de la nuit : il s’agit des différents états de la partie éclairée du disque lunaire qui nous fait face. La Lune n’émet pas de lumière, elle se contente de refléter celle du Soleil. Compte tenu de la configuration de l’orbite de la Lune autour de la Terre, nous pouvons voir la Lune soit pleinement éclairée par le Soleil (Pleine Lune), soit complètement dans l’ombre (Nouvelle Lune). Avec toute une succession continue de croissants plus ou moins ventrus, de demi-Lune dans un sens ou dans l’autre (premier et dernier quartiers), ou encore de disques à peine pleins, bossus, la Lune gibbeuse. Ces différentes phases sont illustrées sur la figure suivante.
Elles ne sont pas toutes visibles à n’importe quel moment de la journée. La Nouvelle Lune est dans l’ombre du Soleil, elle se lève avec lui et se couche en même temps. Elle n’est donc pas facilement visible. Au fur et à mesure que la Lune s’éloigne du Soleil, et se dirige vers son premier quartier, elle devient visible à l’ouest, le soir après le coucher du Soleil, d’abord un fin croissant dont le côté éclairé est dirigé vers la lumière solaire, juste au-dessus de l’horizon dans les lumières du couchant, puis, au fil des jours, le croissant prend du ventre et monte dans le ciel. La Lune se lève donc de plus en plus tard dans la journée, pour finir par se lever au moment où le Soleil se couche lors de la pleine Lune. Puis elle disparaît peu à peu des soirées pour illuminer l’aube. Le dernier croissant, juste avant la nouvelle Lune, se lève un peu avant le Soleil sur l’horizon est. La Lune « croissante », c’est-à-dire dont la surface illuminée visible depuis la Terre augmente, est donc du soir, tandis que la Lune « décroissante » est du matin.
Pour distinguer les deux, on peut prolonger le côté non ventru de la demi-Lune : si on forme ainsi un « p » il s’agit du premier quartier, et si on forme un « d », il s’agit du dernier quartier. Cette petite règle mnémotechnique ne fonctionne qu’en langue française et dans l’hémisphère nord…
L’ensemble des phases de la Lune forme un cycle dont la période est d’environ 29,5 jours, la lunaison.
Vous avez certainement remarqué que parfois, lors d’une nuit claire, le fin croissant de Lune n’est pas le seul à être éclairé : le reste du disque lunaire bénéficie d’un éclairage ténu, mais permettant de distinguer le relief lunaire. Il s’agit de la lumière cendrée, qui est en fait le reflet de la lumière terrestre.
Quant à la pleine Lune, son éclairement n’est que le pâle reflet de la lumière solaire, il ne permet pas de voir les couleurs, ni de lire les petites lettres. Il est néanmoins suffisant pour randonner en terrain découvert ou sur la neige. Et la crème « lunaire » est inutile, le coup de Lune est un mythe !
La Lune est également l’actrice principale de spectacles dont seule la nature a le secret. La trajectoire de la Terre autour du Soleil se situe dans un plan que l’on appelle l’écliptique (parce que c’est dans ce plan qu’ont lieu les éclipses). La trajectoire de la Lune autour de la Terre est inclinée d’environ 5° par rapport à ce plan, elle va donc le croiser deux fois par révolution. Si au moment de ce croisement la Lune est nouvelle, alors une poignée de terriens aura droit à une éclipse de Soleil ; si au contraire la Lune est pleine, alors c’est une éclipse de Lune qui illuminera le ciel nocturne d’une bonne partie de la planète. Si l’orbite de la Lune était exactement dans le plan de l’orbite de la Terre autour du Soleil, il y aurait une éclipse de Soleil et une éclipse de Lune à chaque lunaison. Ce serait dommage : le phénomène n’aurait pas le même attrait s’il était banal ! Mais la plupart du temps la Lune n’est pas alignée avec le Terre et le Soleil.
Quand c’est le cas, si la Lune est entre le Soleil et la Terre, nous avons droit à une éclipse de Soleil. Comme les deux astres ont presque la même taille apparente, le disque lunaire s’immisce juste devant celui du Soleil laissant souvent admirer couronne solaire et protubérances. La contrepartie est que de telles éclipses durent peu longtemps, quelques minutes tout au plus (7 min 40 sec au maximum : l’ombre de la Lune se déplace à 1700 km/h vers l’est, et la Terre tourne d’est en ouest !) pour un lieu donné sur Terre, et qu’elles ne concernent qu’une toute petite partie de la surface de la Terre. En moyenne un lieu donné ne voit l’ombre de la Lune qu’une fois tous les 370 ans… Il vaut mieux avoir l’âme voyageuse si l’on veut avoir l’occasion de voir une éclipse de Soleil : rester chez soi offre peu de chance de bénéficier du spectacle, il faut aller à sa rencontre !
L’ombre de la Lune parcourt une bande – dite de totalité – sur Terre. Cette bande fait au plus 250 km de large. Aux abords immédiats de cette bande, on peut contempler une éclipse partielle de Soleil : elle est moins féérique que l’éclipse totale, mais voir un croissant de Soleil n’arrive quand même pas tous les jours !
La mécanique céleste, théorie qui explique les mouvements des planètes du Système Solaire, permet de prédire avec une grande précision les éclipses à venir. Il faudra patienter jusqu’au 3 septembre 2081 pour contempler la prochaine éclipse totale de Soleil en France métropolitaine. En revanche, la prochaine éclipse de Soleil partielle visible en France aura lieu le 10 juin 2021.
Comme la trajectoire de la Lune est elliptique, sa distance varie, et donc son diamètre apparent également : lors d’une éclipse, elle peut se trouver d’une taille plus petite que le Soleil et un anneau de lumière solaire subsiste alors tout autour de l’ombre de la Lune. Il s’agit d’une éclipse annulaire, particulièrement esthétique, mais également peu fréquente. La prochaine en France métropolitaine aura lieu le 5 novembre 2059.
Attention ! Il ne faut jamais regarder le Soleil directement à l’œil nu, et encore moins avec un instrument grossissant, téléobjectif d’appareil photo ou jumelles : il faut utiliser des lunettes spéciales ou des filtres adéquats !
Quand la Terre se trouve entre la Lune et le Soleil et que les trois astres sont quasiment alignés, nous avons droit à une éclipse de Lune. Depuis la Lune, la Terre occultant la lumière du Soleil, on observerait donc une éclipse de Soleil, qui durerait alors longtemps (jusqu’à 1h47 !) car la taille apparente de la Terre vue de là-bas est bien plus importante que celle du Soleil. Depuis la Terre, l’éclipse de Lune est visible par les habitants qui sont du côté obscur au moment où la pleine Lune s’éclipse, et pour lesquels la Lune s’est levée, donc quasiment par la moitié de la planète. Visible ? La Lune ne disparaît-elle pas du projecteur solaire pour se réfugier dans l’ombre de la Terre ? En fait, ça dépend ! Bien souvent, la Lune reste visible. Et la beauté du phénomène vient essentiellement du fait qu’outre sa relative rareté — la dernière éclipse totale de Lune visible en France a eu lieu le 29 septembre 2015, la prochaine aura lieu le 27 juillet 2018 —, la Lune ne va généralement pas « disparaître » complètement. Pendant la phase totale l’atmosphère terrestre joue le rôle d’une loupe qui va dévier un peu les rayons de notre étoile pour éclairer d’une douce clarté notre satellite momentanément obscurci. Cette lumière traverse l’atmosphère et se trouve être « diffusée » : le bleu part dans tous les sens, le rouge reste. La Lune éclipsée sera ainsi souvent colorée dans dans des tons rougeâtre du plus bel effet.
Mais sa couleur effective lors d’une éclipse est impossible à prévoir – cela peut aller du très sombre au cuivré — car elle dépend des conditions météorologiques là où les rayons du Soleil traversent l’atmosphère. Ainsi malgré les prévisions bien huilées d’une mécanique céleste qui tourne parfaitement elliptique, la nature réserve quand même quelques surprises... Au passage, vu depuis la Lune le spectacle doit être vraiment grandiose (voir : https://www.youtube.com/watch?v=HOk...) : un disque terrestre noir ceinturée d’un arc de couronne rougeâtre rayonnant au beau milieu d’une nuit d’encre. Avis aux amateurs voyageurs !
Une autre manifestation lunaire qui interpelle et peut affecter le voyageur est celle des marées. Pline l’Ancien (23-79 après J.-C.), déjà, expliquait le phénomène des marées océaniques par l’influence de la Lune et du Soleil. Mais il fallu attendre Newton en 1687 et sa loi de la gravitation universelle pour avoir les fondements de l’explication... Car le ballet de la Lune autour de la Terre rythme la vie du bord de mer de par son influence gravitationnelle sur les masses liquides des océans. Le phénomène des marées s’explique par l’équilibre entre la force d’attraction gravitationnelle de la Lune, qui dépend de la distance à laquelle elle s’applique, et la force centrifuge due au fait que la Terre tourne autour du centre de masse du couple Terre-Lune. La force centrifuge, c’est elle qui tend à vous éjecter vers l’extérieur d’un manège en rotation. C’est aussi elle qui empêche la Lune de tomber sur la Terre sous l’effet de sa force d’attraction gravitationnelle comme le fait une pomme. La force centrifuge est la même en tout point de la Terre et la force exercée par la Lune sur la Terre est plus intense du côté de la Terre le plus proche de la Lune, la force résultante – dite de marée — est dirigée vers la Lune au point le plus proche d’elle, et elle est de sens opposé au point le plus éloigné d’elle. Perpendiculairement à l’axe Terre-Lune, la force résultante est à peu près dirigée vers le centre de la Terre.
L’eau des océans va subir cette force de marée, et être attirée côté Lune, et comme repoussée à l’opposée. On va ainsi avoir deux bourrelets océaniques de part et d’autre de la Terre, alignés avec la Lune. Il s’agit des marées « hautes » ; perpendiculairement à cela, la force de marée tend à faire s’abaisser le niveau de l’eau, il s’agit des marées « basses. » Ces bourrelets sont alignés avec la Lune qui tourne autour de la Terre, mais en 27 jours. Or en une journée, la Terre fait un tour sur elle-même : un point de celle-ci verra donc passer les deux bourrelets. D’où les deux marées par jour. Ce sera plus flagrant si on est au bord d’un « grand » océan. En effet, plus la taille de l’étendue liquide est grande, plus la force de marée sera importante. La taille de la Terre est environ de 12 800 km, les marées océaniques soulèvent la surface des océans d’environ un mètre en pleine mer (hauteur qui peut atteindre 15 à 20 mètres près des côtes par suite d’effets de résonance avec le fond marin plus proche). Les marées sont perceptibles car les océans sont de grande taille. Des marées sont visibles sur les plus grands lacs également. Un lac de plusieurs centaines de kilomètres (comme le lac Baïkal, par exemple, 636 kilomètres sur 48) verra sa surface se soulever périodiquement de quelques centimètres. Mais une flaque d’un mètre, verra sa surface se soulever de quelques millièmes de millimètres… Autant dire, pas grand-chose ! Pas de quoi faire pousser les tomates : les calendriers lunaires pour jardiniers en herbe sont seulement une escroquerie. La hauteur de la marée sur le littoral dépend ainsi de la configuration astronomique entre la Terre, la Lune et le Soleil (qui participe aussi aux marées) et de la forme de la côte et des fonds marins à proximité. Elle est prévisible et fait l’objet d’annuaires pour différents lieux (voir : http://maree.shom.fr/). Ces marées provoquent une perte d’énergie par frottement, ce qui provoque le ralentissement de la rotation de la Terre sur elle-même (la durée d’une journée s’allonge d’environ deux millisecondes par siècle) et un éloignement de la Lune (à raison de 3,8 cm/an). Dans quelques centaines de millions d’années, les éclipses solaires totales auront disparu, les éclipses seront plus qu’annulaires… Profitez donc de la prochaine éclipse totale de Soleil, le 2 juillet 2019, visible depuis le Pacifique (avis aux marins !), mais aussi depuis le Chili et l’Argentine !
On trouve un certain nombre d’applications pour smartphone donnant les prévisions des marées. J’utilise « Marée proche de moi ». Il y a le site du Service Hydrographique et Océanographique de la Marine (SHOM) : http://maree.shom.fr/. Le site de l’Institut de Mécanique Céleste et de Calcul des Éphémérides (IMCCE) donne les éphémérides de la Lune et du Soleil (entre autre), celles des éclipses : https://promenade.imcce.fr/fr/pages3/321.html. L’application smartphone « LunaSolCal » donne les éphémérides de la Lune et du Soleil (lever, coucher, phase) pour un lieux donné.
Bonjour, Bravo pour vos explications. Cependant je ne comprends pas comment on peut affirmer que la force centrifuge est la même en tout point de la Terre, alors que Fc=𝑀.𝜔^2.𝑟 Quand j’applique cette formule au couple Terre/Lune autour de leur centre de masse commun, il me semble que les valeurs sont différentes sur les faces extérieures, centrales et intérieures des 2 masses. Pourriez-vous m’éclairer. Cordialement, Jacques Duvivier
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