Le glacier Blanc, goutte à goutte
Le glacier Blanc est le plus grand glacier du massif des Écrins. Il naît sur les pentes de la face nord du point culminant du massif, la Barre des Écrins (4102 m).
C’est un glacier qui était facilement accessible il n’y pas si longtemps. Quand j’étais gamin, dans les années 1980 et 1990, une balade d’une heure sur un sentier en lacet depuis le pré de Madame Carle permettait d’aller admirer la gueule béante du géant de glace. Elle se trouvait juste à côté du sentier. J’allais « explorer » les entrailles de glace.
La passerelle sur le torrent du glacier Blanc en 1986 :
Les années 1980 sont l’objet d’une nouvelle avancée du glacier après une période de récession et avant une nouvelle période de recul qui perdure à l’heure actuelle. Il avait donc fallu modifier le tracé du sentier rejoignant le refuge, en contournant le glacier à l’aide d’une échelle métallique pour franchir une petite barre rocheuse. Cette échelle, désormais inutile, le sentier ayant retrouvé son tracé précédent, a été démontée en 2008.
En 2019, le glacier est loin, loin... (la passerelle n’a pas bougé !) :
Aujourd’hui le front du glacier a reculé de plusieurs centaines de mètres, il remonte d’année en année le verrou rocheux au-delà duquel se trouve un vaste plateau de glace de trois kilomètres de long.
Aujourd’hui, le glacier pleure sa glace. Il fond. Il se rétracte, il rapetisse, il se carapate vers les hauteurs. Peau de chagrin. La faute au réchauffement climatique. La faute à notre civilisation basée sur la combustion du carbone.
En 1900, le glacier Blanc affleurait à proximité du refuge Tuckett, ancien refuge situé sous l’actuel refuge du glacier Blanc, à 2440 m d’altitude. Il avait donc plus de cent mètres d’épaisseur à cet endroit. Son front est actuellement ratatiné vers 2500 m d’altitude. Les cent mètres d’épaisseur de glace ont disparu.
Lors de l’été 1986 je suis allé à deux reprises à côté du glacier Blanc. J’avais 11 ans, je faisais mes premières photos, probablement avec un appareil compact, le Baroudeur. La pellicule en question a le numéro 18...
Comparaison de la rive droite du glacier entre 1986 et 2019 :
La langue glaciaire recouvre majestueusement le verrou en 1986, et le dévoile pudiquement en 2019 :
La fonte est tellement rapide qu’en l’espace de trois petites années, on la voit ! Un gros plan sur le front du glacier entre juillet 2016 et août 2019 :
En septembre 1985, ce fut probablement ma première visite (10 ans) au glacier Blanc :
En famille :
Le glacier Blanc fait l’objet d’un suivi scientifique intense par l’Observatoire du glacier Blanc. Des mesures du bilan de masse, différence entre la masse de glace accumulée en hiver et celle perdue en été (ablation), entre autre, sont faites par le Parc National des Écrins :
Le constat est amer : il perd de sa superbe, indéniablement. Qu’en sera-t-il dans quelques décennies, à l’allure où ça va ?
Une certaine tristesse nostalgique s’empare de moi en voyant ce géant qui semblait immortel du haut de mes 10 ans devenir inaccessible ou presque. Mortel. J’ai fait une balade cet été au refuge du glacier Blanc avec ma fille de 6 ans et demi et ses cousins mais la glace n’a pu être approchée. Seulement observée, de loin. De très loin. Combien de temps, encore ?
Il s’écoule, inlassablement.
Guillaume Blanc
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