Un semestre — en forme de trimestre — s’achève. Avec lui s’achève mon service d’enseignement. Trois mois qui furent bien remplis, j’avais quinze heures de cours par semaine, en moyenne, répartis dans deux enseignements, thermodynamique en deuxième année (L2), phénomènes de transports de la matière et de la chaleur en quatrième année (M1).
J’ai à nouveau appliqué la « méthode » mise en place l’année dernière dans ma façon de gérer un groupe de Travaux Dirigés — un « TD. » J’ai pu en revoir la principale limite, à savoir l’évaporation des étudiants : les étudiants qui ne souhaitent pas travailler activement ne viennent tout simplement pas. Mais finalement, je crois que ce n’est pas pire que dans les TD à la méthode plus traditionnelle.
Je dirais même que contrairement à l’année passée, sur les cinq groupes que j’avais cette année, trois n’ont pas connu d’évaporation critique : ils sont restés sensiblement égaux à leur taille initiale. Mais je n’avais pas d’enseignement en première année, ceci expliquant peut-être cela.
Dans l’un d’entre eux, dit de préparation aux écoles d’ingénieur (L2), les étudiants sont tenus de venir en TD. Obligés de venir, mais pas forcément envie de travailler. Le roulement sur les passages au tableau s’en est trouvé perturbé par des étudiants qui découvraient l’énoncé de l’exercice en arrivant devant leurs camarades. Évidemment, cela n’aide pas.
Et ça plombe la vitesse d’avancement : quand l’étudiant décortique l’énoncé en live, c’est forcément moins rapide que s’il a déjà réfléchi chez lui. Si j’ai pu observer cela dans tous mes groupes cette année (et l’année dernière), en revanche dans le groupe assidu (mais passif), j’ai dû revoir ma copie et définir un noyau d’étudiants motivés pour travailler, en laissant les autres libres d’assister les mains dans les poches. Noyau qui s’est réduit comme peau de chagrin avec le temps. Mais l’assiduité, si elle a été un peu émoussée, ne s’en est globalement pas ressentie. De fait, c’était le seul groupe où j’avais de la discipline à faire (bavardages intempestifs, retards...). Ailleurs la régulation se faisait naturellement : ceux qui n’avaient pas envie d’être là ne venaient pas. Tout simplement.
Autre observation : tout autant en L2 qu’en M1, la méthode fonctionne beaucoup mieux quand une synergie existe dans le groupe entre les étudiants. Ils vont ainsi avoir tendance à travailler ensemble, ce qui les motive et les pousse à progresser et à continuer. Les groupes qui loupent cette opportunité — chacun dans son coin — s’évaporent très vite, leur motivation s’émousse, l’assiduité diminue considérablement. Souvent ils ne préparent même plus...
Une chose qui me frappe de plus en plus, c’est le très très faible nombre d’étudiants motivés, intéressés, curieux. La plupart subissent le cours ou le TD, sans chercher à en savoir plus, à comprendre ce qu’il y a derrière. C’est à la fois inquiétant et démoralisant. Certes, chaque année, il y en a bien une petite poignée que j’ai l’impression d’intéresser avec ce que je raconte. Peut-être pas passionner, mais déjà intéresser. Mais ce n’est pas beaucoup. Tout ça pour ça...
Cela conjugué à une très faible réussite aux partiels, je me demande parfois ce que je fais là. Et pourquoi. Je pourrais faire exactement la même chose avec disons deux fois moins d’heures. Tellement certains TD s’apparentent quasiment à des cours particuliers... Mais je m’accroche encore à des bribes de motivation. Heureusement que moi aussi j’apprends des choses ce faisant. Ce qui me permet d’en tirer malgré tout une certaine satisfaction intellectuelle. À défaut d’autre chose...
La pédagogie, c’est dur, comme certaines sciences. Petits exercices pratiques possibles : donnez un sujet infaisable, avec comme question collective : quels concepts, éléments, clés… vous manquent pour pouvoir résoudre l’exercice. Laissez travailler en groupe, parole libre, ils peuvent se parler, comme dans un jeu. Ensuite, attendez, taisez vous, n’ayez pas peur du silence. Passage au tableau en groupe d’émulation : le problème n’est pas résolu par un, mais par un groupe de deux ou trois qui a pu travailler ensemble pendant un temps donné. C’est un jeu, un plaisir, la pédagogie.
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