La paroi
Lundi dernier je me baladais à Paris à côté de Jussieu. Là, un bouquiniste, dont la devanture s’étale sur le trottoir. Je jette un œil distrait sur les vieux bouquins tout jaunis. Sait-on jamais. Et je tombe effectivement sur un poche au titre accrocheur « La paroi », de Pierre Moustier. Publié en 1969 chez Folio. Plus tout jeune. Un roman sur la montagne et l’escalade pour deux euros, je n’hésite même pas. D’autant que la quatrième de couverture est tout de même alléchante :
- Encore vingt minutes et c’est gagné.
- Vingt minutes ?
- Peut-être moins. Ne t’endors pas !
- Je ne m’endors pas... Philippe ?
- Oui.
- Tu vois le sommet ?
- Tout à l’heure, en tombant à la renverse, je l’ai vu.
- Comment est-il ?
- Il a une sale gueule... comme nous.
Et je l’ai lu. J’ai d’abord terminé « Ascensions », l’autobiographie de Catherine Destivelle, que j’ai dévoré en deux jours (et oui, je suis dans une période lectures de montagne et d’alpinisme ; c’est comme ça, ça va... ça vient...). Puis j’ai attaqué mon petit livre jauni par le temps. Une histoire simple : deux hommes, une montagne, une paroi à gravir. Deux qui se détestent. Mais le miracle de la montagne, le partage de la cordée va finir par aplanir la haine entre ces deux êtres, le jeune entrepreneur, et le vieux ronchon. Malgré l’apparente simplicité de la trame, l’auteur tient en haleine son lecteur jusqu’au bout. Plus qu’un récit technique, c’est l’histoire de ces deux hommes qui est mise en exergue. Leurs sentiments, leurs histoires respectives... Tout cela au milieu des épreuves qu’ils subissent pour gravir cette montagne dont on ignore tout.
J’ai avalé les 189 pages de ce petit livre rapidement. Dans le train, dans un bouchon sur la route, et finalement dans mon lit ! J’ai adoré. Moustier écrit avec légèreté. Il décrit l’ascension et les états d’âmes de ses deux protagonistes avec un naturel désarmant, qui ne donne qu’une envie au lecteur que je fus : celle d’aller voir plus loin, plus avant, plus haut ! Envie de mieux connaître les deux personnages, envie de savoir comment ils vont se sortir du traquenard tendu par la montagne, s’ils vont simplement s’en sortir... Page après page, on finit par buter sur la fin, simple et dépouillée, comme un sommet. Mais néanmoins très belle. Comme un sommet.
Quelques belles phrases que j’ai relevé ça et là...
Il faut se méfier de la régularité, de la monotonie, sinon la vie se confond avec la pluie ; on meurt sans s’en apercevoir.
On se trompe toujours un peu quand on est sûr de quelque chose.
Le progrès technique a pris dans les âmes la place que la religion a perdu. On aurait pu trouver mieux.
Le sens du ridicule ne nous laisse jamais tout à fait libre.
Il faut être indulgent. Les femmes ont besoin de rites.
L’existence est à la merci d’un détail infime.
Guillaume Blanc
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